Livre – Critique – Robin Hobb – Le Soldat Chamane 1

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Kelem du site ChaOdisiaque nous fait part une nouvelle fois d’une excellente critique littéraire, de retour avec un livre de Robin Hobb : Le Soldat Chamane 1 « La Déchirure ». Je vous met sa critique sans plus attendre.

Kelem a dit :

Jamère vit dans une culture gouvernée par un code social rigide. Mais, à l’âge de quinze ans, il est confié par son père à un étrange guerrier nomade qui, à l’aide de drogues et d’une expérience de transe chamanique, le propulse dans un autre monde. Il y rencontre une mystérieuse magicienne, sorte de femme arbre, qui s’empare de son esprit et le dresse contre la civilisation dont il est issu. Dès lors, Jamère est déchiré entre ces deux cultures…

Bien évidemment, vous connaissez tous Robin Hobb, puisque, en suivant les conseils avisés de Chaodisiaque (et, finalement, de toute la critique fantasy, unanime), vous vous êtes délectés au fil des milliers de pages de L’Assassin Royal. Il n’est donc pas nécessaire de présenter l’un des très grands auteurs de fantasy actuels. Il était donc plus que temps de partir à la découverte du Soldat Chamane, sa dernière grande saga en date, qui se compose de huit volumes (tous traduits et sortis en français, la parution en poche est en cours).

Avec Le Soldat Chamane, Robin Hobb prend le parti de créer de toutes pièces un tout nouvel univers, rompant ainsi avec les Rivages Maudits, le monde qui accueillait ses deux immenses saga précédentes, L’Assassin Royal donc, mais aussi Les Aventuriers de la mer. Mais elle renoue aussi avec ses premières amours d’écriture, puisque cette nouvelle histoire est narrée à la première personne, dans ce style qui lui avait si bien réussi dans sa première saga. C’est donc avec le héros, Jamère Burvelle, que nous entrons dans le monde de Gernie, un royaume en plein essor, puisque le Roi, avec l’aide de son armée, est parvenu à vaincre et à soumettre la population nomade, pour pouvoir étendre son royaume dans les plaines de l’est, où débute le récit. Jamère est le fils d’un nouvel aristocrate, ancien haut gradé de l’armée, récompensé par le roi par l’attribution des nouvelles terres. Ce premier volume est centré sur les années d’apprentissage de Jamère, puisqu’en tant que deuxième né de la famille, il est destiné à la carrière militaire, selon les écritures du « dieu de bonté » (qui destine chaque premier né à reprendre les terres de son père, chaque troisième né à embrasser la carrière de la prêtrise, etc.).

Voici un exemple de l’extraordinaire capacité de Robin Hobb à façonner un univers merveilleusement crédible, si l’on me pardonne l’oxymore. Sans avoir besoin de développer les descriptions sur des centaines de pages, le Royaume de Gernie, par toute une série de petites touches disséminées ici ou là, prend forme, se construit, cohérent, et l’on y croit, bien sûr. D’autant que si le récit est écrit à la première personne, il prend aussi la forme, tout comme l’Assassin Royal mais cela y était moins marqué, d’une sorte d’autobiographie fictive du point de vue de Jamère qui, on le suppose, écrit ses mémoires. La précision descriptive se double alors de l’incertitude toujours un peu floue du processus mémoriel auquel se livre le personnage. Quel plaisir de lire un roman de fantasy pourvu d’une narration un tant soit peu originale… !

Ce premier volume français débute ainsi, pendant toute sa première moitié, par une découverte de Gernie par les détails et les premiers pas de Jamère dans la vie militaire ont un attrait qui captive immédiatement le lecteur, jusqu’à son départ avec Dewara, le rugueux chamane qui va initier, durement, Jamère le soldat. Cette nouvelle dimension du récit permet à Robin Hobb de réutiliser des situations où elle excelle : l’attrait magique de la nature, le bouleversement personnel et intime, et bien sûr les souffrances du héros : dès ce premier tome, on peut aisément repenser à ce qu’a enduré Fitz, même si bien sûr Jamère n’en est pas encore là.

Dans la deuxième partie du roman, Jamère quitte sa terre natale pour la grande capitale, où il va intégrer l’Ecole de Cavalla (nom local de la cavalerie, vous l’aurez deviné). C’est l’occasion pour Robin Hobb d’à nouveau construire patiemment son nouvel univers. Un peu trop patiemment d’ailleurs puisque ces longs chapitres dédiés à l’école semblent perdre quelque peu le fil de l’histoire. Cela dit, l’ambiance de l’école est tout à fait digne d’intérêt, l’auteur parvenant aisément à nous faire sentir l’ambiance de camaraderie couplée à celle d’une charge démentielle de travail qui ne sera pas sans rappeler celle de certaines des classes prépas bien de chez nous.

Le défaut de ces pages est de délayer l’intrigue. Mais cela est à coup sûr à mettre au compte – encore une fois – du découpage opéré par l’éditeur français. L’apprentissage de Jamère et son initiation au chamanisme font clairement figure d’immense prologue à la saga, alors que la véritable première partie est son arrivée à l’école. Le volume français s’interrompt en plein milieu de cet arc narratif, et cela se ressent clairement comme un défaut de construction, non imputable, bien sûr, à Robin Hobb elle-même.

On attend, néanmoins, avec impatience le deuxième volume, car les fils découverts lors du premier sont, comme prévu et espéré, dignes du plus haut intérêt.

Le Soldat Chamane 1, La Déchirure, est disponible en français chez Pygmalion, et chez J’ai Lu.

Note : 14/20
Une première moitié de roman magnifique, qui embarque d’emblée le lecteur. La très intéressante Ecole de Cavalla perd un peu de vue l’intrigue, mais il s’agit manifestement d’un effet pervers d’un mauvais découpage français.

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